Des miliciens nuer de la « White Army », dans l’Etat sud-soudanais du Haut-Nil, en 2014
GORAN TOMASEVIC / REUTERS

Depuis son indépendance en 2011, le Soudan du Sud fait face à de nombreux conflits et tensions politiques, militaires et sociales. Le 15 avril 2023, des affrontements éclatent dans tous le pays, principalement dans la capitale Khartoum. 2 camps se forment alors, l’armée au pouvoir et les forces paramilitaires. Mais il faut remonter 10 ans en arrière pour comprendre l’ampleur du désastre qui s’abat sur ce territoire.

En effet, suite à l’indépendance du pays, plusieurs différents émergent entre les partisans du président Salva Kiir et ceux du vice-président Riek Machar. Cette rivalité fait resurgir d’anciennes dissensions entre les différents clans du Mouvement populaire de libération du Soudan, l’ancienne rébellion qui mena le pays à l’indépendance en 2011, sur fond de rivalité ethnique d’un côté les Dinkas (ethnie majoritaire de Salva Kiir) et de l’autre les Nuers (ethnie de Riek Machar). Débutée en 2013, la guerre civile s’abat sur le pays et n’aboutit finalement qu’à un cessez-le-feu en 2020. Ce conflit est à mettre en relation avec les différents coup d’états, les conflits religieux, les famines et les exodes de la population, qui ont ravagés le pays durant tout le XXe siècle.

En 2019, une révolution chasse le président en place et un gouvernement par intérimaire est mis en place. Cependant, en 2021, les militaires s’emparent du pouvoir et s’engagent à transmettre le pouvoir à un gouvernement civil. Cet accord est entravé par des tensions au sein de l’armée, entre les différents chefs militaires rivaux. Ce qui pose effectivement problème, c’est l’intégration du FSR (Forces de Soutien Rapide), un groupe paramilitaire créé au Soudan par un chef militaire et supervisé par la coalition de l’Arabie Saoudite durant la guerre du Yémen. Il est également soutenu par le groupe paramilitaire extrémiste Wagner, qui œuvre pour les intérêts de la Russie, dont on entend beaucoup parler et qui inquiète en raison de sa présence sur les terrains de guerre, particulièrement en Afrique et au Moyen-Orient.

La junte militaire qui dirige le Soudan depuis 2021 mobilise de plus en plus de soldats le 13 avril 2023. Cette mobilisation est considérée comme illégale par l’armée soudanaise.

Finalement, le 15 avril 2023, plusieurs tirs sont entendus dans la capitale et dans d’autres grandes villes, marquant la renaissance d’un conflit destructeur, qui inquiète.

Une crise humanitaire s’installe. Les combats dans la capitale ont laissé un grand nombre de ses cinq millions d’habitants bloqués dans leurs maisons sans électricité ni eau pendant plus de 48 heures. La plupart des habitants n’osent pas sortir de chez eux pour aller chercher de la nourriture et des provisions afin d’éviter d’être pris dans les tirs croisés. Un groupe de médecins a déclaré que les hôpitaux manquaient de personnel et de fournitures face à l’afflux de blessés. Le 17 avril, l’Association médicale soudanaise a déclaré que des bombes avaient frappé l’hôpital al-Shaab et l’hôpital al-Khartoum, obligeant les deux hôpitaux à interrompre leurs services d’urgence. On parle aujourd’hui d’une véritable tragédie qui s’abat sur les populations.

A l’étranger, les réactions fusent de toutes les directions. L’Algérie appelle à « une action commune et urgente pour éviter une nouvelle escalade et mettre fin aux combats ». Le Tchad ferme sa frontière terrestre avec le Soudan. La Chine appelle les deux parties à mettre fin aux combats dès que possible. La Norvège conseille à ses citoyens d’éviter tout voyage au Soudan. La Corée du Sud déclare qu’elle envoie un avion militaire, transportant des soldats et du personnel médical pour évacuer ses 25 ressortissants au Soudan. Le ministre britannique des Affaires étrangères écourte une visite en Nouvelle-Zélande et annule un voyage ultérieur à Samoa pour se concentrer sur le suivi de la situation au Soudan. Le Secrétaire général de l’ONU appelle le chef des FSR à « cesser immédiatement les hostilités ».

La France a évacué 538 personnes, dont 209 Français, du Soudan.

Après 20 jours d’affrontements, le pays est au bord du précipice. Les aides internationales se multiplient mais ne sont malheureusement pas suffisantes. L’ONU s’inquiète particulièrement de la situation au Darfour occidental, où une centaine de personnes ont été tuées dans des combats auxquels, selon elle, participent des civils. A ce conflit s’ajoute une précarité grandissante, des épidémies de rougeole et de choléra qui déciment la population et un système de santé plus qu’alarmant.

La situation au Soudan est telle aujourd’hui qu’elle doit nécessiter toute l’attention de la communauté internationale et tous croient en un avenir meilleur, dans ce pays d’Afrique de l’Est, encore dans une logique de développement difficile.

T. L.

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