Morgan Fache / AFP

Alors que le 101e département français était déjà en proie à de très vives tensions sociales ces dernières années, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a ordonné le 22 avril dernier le lancement d’une vaste opération sécuritaire menée conjointement par la gendarmerie et les forces armées françaises. Sobrement baptisée opération Wuambushu, ou “reprise” en mahorais, cette intervention incarne en effet la volonté des autorités françaises d’apporter une réponse ferme à la situation de crise que traverse Mayotte. Tentative de régulation de l’immigration clandestine en provenance des îles voisines des Comores, réponse à un climat d’insécurité grandissant ou destruction de nombreux bidonvilles qui ne cessaient de s’étendre à travers le territoire : les objectifs affichés s’avèrent ambitieux mais il est certain que le gouvernement n’a pas su saisir l’ampleur des retombées de cette opération.

Le lancement de cette dernière, prévoyant le démantèlement de nombreux bidonvilles, a tout d’abord mis la lumière sur les conditions de vie déplorables, comme on le perçoit sur cette photographie, des migrants arrivés de manière clandestine sur ce territoire insulaire devenu département français à part entière en 2011. Ainsi, l’ensemble de ces constructions en taule marquées d’une croix rouge, comme ici, seront destinées à être démolies. Déjà atteint par la misère et la précarité, les résidents de ces bidonvilles, essentiellement des immigrants clandestins, vivent donc aujourd’hui sous la menace constante d’une possible destruction de leurs habitations, qui se traduirait à terme par leur expulsion du territoire.

Décidée de “manière unilatérale par la partie française”, selon les dires du gouvernement comorien, le lancement de cette opération s’est en outre suivie d’un imbroglio diplomatique vis-à-vis de l’Etat voisin. Ayant de toujours désapprouvé l’opération, ces derniers ont en effet refusé l’accostage de navires en provenance de Mayotte transportant un grand nombre de leurs ressortissants clandestins, laissant alors ces individus dans la confusion la plus totale, à la fois expulsés de leur domicile par les autorités françaises et se trouvant dans l’impossibilité de rejoindre leur pays d’origine.

Affichée comme une mesure de lutte contre la délinquance et l’insécurité qui ravagent ce territoire, l’opération Wuambushu a enfin fait face à de nombreuses déconvenues sur le plan sécuritaire avec de nombreux affrontements entre forces de l’ordre et populations locales, des infrastructures publiques incendiées ou bien la multiplication des barricades de fortune pour freiner l’avancée des policiers. Aujourd’hui au point mort, l’opération Wuambushu pourrait bien définitivement déstabiliser le plus pauvre des départements français, au bord de l’implosion.

M. M.

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